Billet : le sens de la prépa et des Grandes Écoles
Pourquoi faire le choix d’effectuer une classe prépa puis une Grande Ecole ?
Comme chaque année, la question est d’importance pour bon nombre de lycéens qui vont faire le choix ou hésitent à s’engager dans cette filière.
Afin d’alimenter la réflexion, un premier élément de réponse tient évidemment à l’intérêt d’étudier en classe préparatoire (2 ans), puis en Grande Ecole (3 ans) et enfin d’enchainer ces deux cursus dans le cadre d’un cycle complet (5 ans).
L’intérêt d’effectuer une classe préparatoire repose notamment sur l’opportunité :
- de vivre une expérience étudiante privilégiée, grâce à des effectifs réduits (moins de 48 étudiants par classe), la qualité des étudiants (sélectionnés sur la base de leurs résultats et aptitudes scolaires) et la qualité des enseignants (tous professeurs agrégés) ;
- de se doter de vrais savoirs et d’une culture générale approfondie avec plus de 1 000 heures d’enseignement par an soit approximativement le double du volume d’heures d’enseignement dispensées par d’autres formations;
- de développer un très large volant de savoirs-faire, savoirs-être et compétences ou soft skills (comme par exemple les capacités d’analyse, de synthèse, d’argumentation, de modélisation, d’organisation, etc.) ;
- de pouvoir, à l’issue de la prépa, choisir parmi de très nombreuses Grandes Ecoles membres de la Conférence des Grandes Ecoles (plus de 25 écoles Management, 145 écoles Ingénieurs, Ecoles Normales Supérieures, IE, CELSA, etc.) en fonction de leurs résultats.
L’intérêt d’effectuer une Grande Ecole, permettant :
- d’obtenir un diplôme reconnu en France (diplôme reconnu en France, bac + 5, visé par l’Etat, conférant un Master ou Diplôme d’ingénieur - CTI) et d’une notoriété à l’étranger (reconnaissance notamment par les organismes d’accréditation AACSB, EQUIS, etc. ou par des classements internationaux) ;
- de se doter d’une culture professionnelle - généraliste et spécialisée dans un domaine spécifique, mêlant expériences académiques (cours, projets de recherche, etc.), expériences professionnelles (stages, apprentissage, césure, entrepreneuriat…) et expériences associatives (sportives, étudiantes, artistiques et culturelles, solidaires) ;
- de bénéficier d’une grande qualité d’insertion professionnelle et d’une large diversité de carrières (cf. l’enquête annuelle dédiée à l’insertion des jeunes diplômés par la Conférence des Grandes Ecoles).
Et enfin l’intérêt d’enchaîner une prépa puis une Grande Ecole grâce à :
- la détention donc d’une double culture, générale et professionnelle ;
- la construction d’une culture internationale (par des semestres ou années effectués à l’étranger dans le cadre d’échange universitaire dans des universités partenaires, d’expériences sur un campus de l’Ecole à l’étranger ou de stages ou missions en entreprises) ;
- l’opportunité facilitée d’obtenir un double diplôme (manager/ingénieur ou ingénieur/manager, ingénieur/entrepreneur, ENS/HEC, manager/IEP, manager/juriste, etc.)
- la possibilité de prolonger ses études (Master Spécialisé, Thèse de Doctorat, PhD) ;
- une « transformation» lente, progressive, et longitudinale en cinq ans du jeune lycéen en adulte professionnel, combinant avec cohérence sa personnalité, son parcours, et son projet professionnel et personnel.
Le deuxième élément de réponse, le plus important à nos yeux, tient au sens de la formation. Il nous semble en effet essentiel, pour tout lycéen sur le point de s’engager sur une formation aussi spécifique que la filière classe préparatoire-Grande Ecole de bien comprendre le sens de celle-ci. Selon nous, un des enjeux de la filière dans sa globalité est de former et d’éduquer des « esprits éclairés ». La génération actuelle aura à évoluer dans une économie de la connaissance et post-industrielle dans laquelle, pour résumer au risque de caricaturer, le savoir - plus que les ressources matérielles - est à l’origine de la création de valeur et de richesses. En ce sens, une culture générale solide et rigoureuse complétée par certaines capacités comme par exemple l’esprit critique ou la recherche scientifique, permettent de remédier aux affres de la sur- ou désinformation et d’une société de l’opinion … Comme le formule Edgar Morin , « il est démontré que le développement des aptitudes de l'esprit humain à traiter des problèmes généraux facilite le traitement des problèmes particuliers ».
Une autre intention de la filière consiste aussi selon nous à former et éduquer « des hommes et des femmes libres ». La génération actuelle a, quoi qu’on en dise, la chance de vivre dans un monde très ouvert et riche d’opportunités : nouveaux territoires professionnels (comme par exemple l’Asie ou l’Afrique), nouvelles industries et technologies (comme par exemple la robotisation) ou encore nouveaux métiers (comme par exemple ceux dédiés à l’intelligence artificielle). Mais encore faut-il que chaque étudiant(e) soit capable de les détecter, de les choisir et de les saisir. Bien au-delà de la technicité ou même de l’employabilité au sens large, la filière offre aux étudiants une liberté quasi infinie de parcours et de trajectoires en développant notamment leur « esprit d’entreprendre ». Pour reprendre la citation bien connue de Georges Bernard Shaw, « il y a ceux qui voient les choses telles qu’elles sont et se demandent pourquoi et ceux qui imaginent les choses telles qu’elles pourraient être et se disent … pourquoi pas », nous pensons sincèrement que la filière classe prépa puis Grande Ecole est une des rares formations réconciliant ces deux aspects.
Enfin, l’ambition de la filière est de former et d’éduquer des « acteurs responsables » (managers, ingénieurs, chercheurs, dirigeants, entrepreneurs). Les jeunes diplômés auront vocation à non plus opposer ou prioriser mais bien tenter de réconcilier des enjeux écologiques/environnementaux, sociétaux/humains et économiques/financiers. Entre les extrêmes du « profit pour le profit » ou du « tout sauf le profit », la ligne de crête de la performance « durable » est tenue mais elle pourra être suivie par ces étudiants qui sont non seulement des scientifiques avérés mais aussi des personnes conscientes des effets éthiques de leurs décisions et actions. S’inscrivant quelque part en faux ou en réaction à la citation de Paul Valéry écrivant que si “l'homme sait assez souvent ce qu'il fait, il ne sait jamais ce que fait ce qu'il fait ». La filière, grâce à sa complétude, permet en effet aux jeunes diplômés de se doter de diverses grilles de lecture éthiques et multi-dimensionnelles leur permettant d’appréhender des systèmes interdépendants et des situations complexes.
Pour conclure, nous espérons que ces quelques lignes, tant sur l’intérêt que sur le sens de la filière classe préparatoire – Grande Ecole sauront, parmi bien d’autres représentations et aides à l’orientation, alimenter la réflexion des lycéens et de leurs parents.
Franck MOREAU
Chef d'établissement adjoint de l'enseignement supérieur / Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
1 Par opposition, sans aucun jugement de valeur car il appartient à chacun de trouver la formation qui correspond à son projet et sa personnalité, à une formation courte (IUT, BTS), universitaire (Licence, Bilicence, Master, Doctorat), postbac (Bachelor, BBA, Grande Ecole, …).
2 Classe préparatoire (économique et commerciale, scientifique, littéraire ou autres) puis Grande Ecole (Management, Ingénieurs, ENS, etc.)
3 D’autres enchaînements étant possibles via les admissions sur titre (« admissions parallèles ») après une L2, un BTS, un IUT, etc.
5 Développé par exemple par l’enseignement de l’entrepreneuriat, de la création d’entreprises, du management de l’innovation, du design thinking, l’accès à des incubateurs, des concours, etc.)
